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Saison estivale : le grand bain des expos

Demain commencera l'accrochage de ma première exposition individuelle : "Zones d'indiscernabilité", au Couvent des Cordeliers à Dinan (22100) investi pour l'occasion par dix artistes visuels (dont moi), chacun bénéficiant d'une salle entière.


Des doutes, encore des doutes

Autant vous dire que je suis pas mal excitée, j'ai hâte, je boue, j'ai peur aussi. De quoi ? De la platitude morne de jours où pas un chaland n'envisagerait sérieusement l'acquisition de mes peintures, pourtant si inspirées, si pleines d'effort, si consciencieuses que pour tout vous dire, j'en suis presque arrivée à saturer. Si, si, à trop manger de beignets, on s'écœure - alors à trop peindre et bichonner ses créations, on finit par avoir envie de plancher sur des problèmes de philo, ou de glaner des fleurs des champs, ou de faire la sieste sous en pommier en bouquinant du Prévert. Ce à quoi on peut objecter : s'il n'y avait pas un brin de surmenage mental, je risquerais d'oublier qu'être artiste est un vrai travail. Soit.


J'en reviens à mes attentes inquiètes concernant mes expositions à venir. J'expose dans la petite ville que je connais bien, près de chez mes parents, avec d'autres artistes et dans un contexte convivial, extrêmement libre, en plein cœur d'une saison touristique que le réchauffement climatique promet d'être encore plus florissante (c'est connu, en temps de canicule, la Bretagne est un paradis). Qu'est-ce que je risque au fond ?

Pas grand-chose, ok ; sinon de perdre de l'argent, sacrifier mon été (je peux peindre ou travailler en même temps que j'assurerai la permanence, mais à quoi bon si je fais un gros flop de toute façon?), décourager ma carrière naissante, décevoir mes proches - qui ne savent pas plus que moi quelles sont mes chances en tant qu'artiste, et qui, par défaut ou par amour, sont bien obligés d'y croire avec moi. Et au bout du compte, rester dans la niche moyenne de peintre de déco noyée dans la masse vieillissante et prolifique des artistes du dimanche. Ce dernier point, je m'y attend plus sûrement. On ne décolle pas de la piscine locale après une expo en mercenaire de la peinture contemporaine : patience.


Mon objectif évident pour cet été, c'est de vendre des toiles, bien sûr. Ne serait-ce que pour faire de la place. Le bonus, l'objectif qui talonne mes espoirs commerciaux, serait de provoquer un enthousiasme bien placé qui m'assurerait la fidélité d'aficionados, ou de mécènes ou encore de galeristes, bref d'autres personnes éclairées, intéressées et désireuses de soutenir mon ascension sans me sucrer au passage mes pauvres dividendes (actuellement mes économies personnelles). J'ai conscience que de tels animaux culturels sont rares - davantage sans doute au sein des troupeaux de touristes amoureux des petites villes médiévales bretonnes - mais, qui sait.


Préparation ardue : il est temps que ça bouge

Ayant anticipé ainsi la déception possible (je me refuse encore à dire "probable") de mes expositions, loin de me résigner, j'ai fourni dernièrement un surplus d'efforts en communication. Oh, pas grand-chose, ce domaine obscur de l'auto-promotion ne réveille nul génial stratège ou bourreau de travail en moi - on s'y attendait. J'ai avisé quelques sites spécialisés et l'office de tourisme de la ville pour ajouter mon exposition à l'agenda culturel ; j'ai imprimé quelques affiches, que j'ai timidement dispersé en ...trois endroits de la ville (il est fort difficile de trouver des affichages publics adéquats, voyez-vous !) et je viens de recevoir les petits tracts résumant mes expositions, que je prévois de diffuser plus largement dans tous les commerces possibles. J'ai créé sur facebook des événements précis. Pour ceux qui pensent qu'être artiste est principalement une balade oisive dans les affres délicieux de la créativité, sachez que tout ce qui se rapporte à la communication dans mon cas me prend des heures (car je suis consciencieuse même pour les tâches les plus pénibles). En outre, lorsque l'on garde au fond l'idée insidieuse d'être un imposteur, de "faire semblant", se vendre croyez-moi nécessite un surplus d'audace, de l'esbrouffe, un simulacre de confiance en soi comme on passe une robe de bal et pas mal d'auto-persuasion (mais oui, c'est bien ce que je fais !). J'en peux plus.


Depuis trois jours, je me promets d'aller courir sur la plage le matin ; j'échoue. J'abdique. Pas envie. J'ai passé mes journées à peaufiner mes tableaux, les préparer pour leur accrochage, prendre les dernières photos et, au compte-gouttes, faire mes devoirs de logistique. J'ai en tête une charge mentale stupidement élevée et probablement inutile, car je n'en agis pas vraiment plus efficacement et mon quotidien est assez mou et lent, pris dans l'engourdissement tétanique d'une solitude inquiète. Seul point positif en ce début d'été radieux : quand par hasard mes yeux captent quelque part le reflet de ma silhouette traînante et mollement vêtue, je me trouve moins dégueu que ce qu'en mon quotidien pantouflard je ne me laisse confusément penser de moi-même. Jolie, même. S'aimer beaucoup ne veut pas dire qu'on ose plus s'imposer, sachez-le.


Demain, je file à Dinan pour récupérer les clefs de ma salle et accrocher mes toiles. J'ai hâte, vraiment ! Un peu de mouvement dans ma torpeur, de contacts dans mon esseulement, ça ne peut qu'être positif. Et je vous jure, cette exposition, cela va être une bombe visuelle - vous êtes prévenus !





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